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Clôture

parYves POZZO DI BORGO, président de l'institut Jean Lecanuet, ancien sénateur de Paris

Articles de la revue France Forum

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La première leçon importante de nos travaux est que, si l’on veut bien prévoir et repérer les signaux faibles, il importe de ne pas trop regarder dans le rétroviseur. L’exercice est difficile, encore plus pour un pays aussi mémoriel et administratif que le nôtre. Nous sommes confrontés à des cibles mobiles qui, par prudence et par nature, préfèrent toujours être dans l’innovation plutôt que dans la copie. Nous devons le savoir et nous adapter.

La deuxième leçon est que la vérité sur ces sujets naît rarement d’une réflexion solitaire ou même d’un travail en circuit fermé dans son laboratoire ou son service. Le mathématicien Cédric Villani témoigne ainsi avoir eu l’idée qui lui a valu la médaille Fields en en discutant autour d’une table avec des collègues. La bonne prévision se nourrit de l’échange, du dialogue et de la coopération, en particulier de la coopération européenne et internationale. Les terroristes n’ont pas de frontières ; nous ne devons pas en avoir non plus – ni intellectuelles ni géographiques.

Nous avons également besoin de croiser les disciplines et les compétences. Ainsi, les universitaires sont tout aussi nécessaires que les experts. Pour reprendre le propos de Bergson, il ne faut pas seulement de l’intelligence rationnelle, mais aussi de l’intuition. Les enjeux de ressources humaines sont donc capitaux dans nos administrations. Ces mêmes ressources doivent aussi avoir la liberté d’exprimer leurs convictions. Nos administrations, notamment l’armée française, concentrent beaucoup d’intelligence, mais celle-ci doit pouvoir s’exprimer.

Nous devons lourdement investir dans le champ du numérique. Tout comme nous avons des forces spéciales capables de s’adapter à des combats en montagne ou en milieu urbain, nous devons avoir des forces spéciales du numérique, capables de débusquer et de punir les nouvelles criminalités. La commission des affaires européennes du Sénat, dont je suis vice-président, est particulièrement préoccupée par le « darknet ». Le coût de la cybercriminalité, d’ici à 2020, est estimé à 2 700 milliards d’euros.

Enfin, nous avons besoin dans nos démocraties de trouver le bon équilibre entre le secret et la transparence. Le secret est nécessaire, mais non l’opacité. La véritable réponse au terrorisme et aux mafias est un appareil d’État discret et performant dans le domaine de la sécurité, mais aussi et surtout une population informée et sensibilisée à ces questions.

Tout n’est pas prévisible. nous devons à tout prix améliorer la qualité du tête-à-tête entre experts et décideurs, souvent très improductif. Le constat n’est malheureusement pas propre à la lutte contre le terrorisme. La meilleure réponse à la criminalité, au terrorisme et aux mafias n’est pas moins de transparence, mais plus d’information ; pas moins de démocratie, mais plus de démocratie.

Choisissons la transparence et la démocratie plutôt que l’opacité et la limitation de nos libertés.

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