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Message de Olafur Ragnar Grimsson

parÓlafur Ragnar GRIMSSON

Articles de la revue France Forum

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Je suis très honoré d’avoir été invité à me joindre à vos débats, mais retenu par de nombreuses obligations dans mon pays, je suis malheureusement dans l’impossibilité d’être parmi vous aujourd’hui.

Au cours des dernières années, j’ai pu constater l’intérêt croissant de la France pour la coopération arctique et recevoir en Islande l’éminent homme d’État et ambassadeur pour l’Arctique, Michel Rocard.

À l’occasion de ma visite officielle en France, l’année dernière, l’Arctique a fait partie des principaux points discutés lors de mon entretien avec le président François Hollande, ainsi qu’au cours des rencontres avec les membres du Sénat et de l’Assemblée nationale. J’ai eu aussi l’occasion de m’entretenir avec de brillants experts et scientifiques français.

Compte tenu de l’intérêt grandissant du monde pour l’Arctique, il est de la plus haute importance que l’engagement scientifique, politique et économique de la France dans cette région se poursuive et se développe.

Souvenons-nous combien est récente, d’un point de vue historique, la connaissance du monde moderne de ces lointaines, vastes et inconnues régions du Nord.

Pendant des siècles, et même pendant une grande partie du XXe siècle, l’Arctique est demeuré largement inconnu, hormis des peuples autochtones qui y vivaient depuis des millénaires. Par la suite, le renforcement croissant des capacités militaires dans les régions nordiques, de l’Alaska jusqu’à Mourmansk, a placé cette région au coeur des conflits de la guerre froide et en a fait une zone interdite pendant presque toute la seconde moitié du siècle passé.

Aussi, historiquement parlant, en comparaison avec les civilisations millénaires européenne et asiatique, l’Arctique, en tant que territoire de coopération, de progrès économique et politique, est pratiquement comme une nouvelle planète ; une région si jeune dans le contexte global qu’elle n’a pas d’équivalent.

Lors de la création du Conseil de l’Arctique dans les années 1990, les huit États membres étaient encore hésitants dans leurs démarches et son mandat fut donc très limité, principalement réduit à la science et à l’environnement ; une présidence tournante et pas de secrétariat permanent.

Mais le Conseil de l’Arctique a mûri, s’est transformé en un instrument efficace pour négocier des traités, des accords globaux et des actions concrètes. Et encore plus remarquable, depuis la décision du Conseil des ministres de Kiruna l’an dernier, plus de la moitié des pays du G20, dont les principaux États d’Europe et d’Asie, seront d’une manière ou d’une autre à la table de l’Arctique.

L’Arctique, encore lointain et inconnu à la fin du XXe siècle, est aujourd’hui devenu un nouveau champ d’action où les principales forces économiques et politiques avancent progressivement, garantissant leur présence et leurs intérêts à long terme.

C’est dans ce contexte que la poursuite de l’engagement actif de la France revêt une importance particulière. Lors de mes nombreuses rencontres avec Michel Rocard et d’autres personnalités – parlementaires, scientifiques, experts, hauts fonctionnaires français –, j’ai pu mesurer de très près tout ce que la France avait à offrir.

Au sein du Arctic Circle, nouvellement établi et dont la première assemblée s’est tenue à Reykjavik l’année dernière, devant plus de 1 200 participants issus de plus de 40 pays, la France a constaté les multiples possibilités qui s’offraient à elle pour renforcer sa participation au Conseil de l’Arctique, au-delà de son rôle d’État observateur.

Au cours de cette assemblée, les États observateurs, comme la Corée du Sud et Singapour, ont présenté leur vision de l’Arctique, leur contribution et leurs actions spécifiques, lors d’une session plénière spéciale.

Je profite de cette occasion pour redire combien il serait souhaitable que la France en fasse autant lors de la deuxième assemblée de l’Arctic Circle, en octobre prochain1, et rejoigne ainsi le Japon et l’Italie qui ont déjà exprimé un tel intérêt. Une session plénière spéciale de la France permettrait à sa délégation de communiquer avec efficacité un message auprès d’une large audience.

J’espère que vos débats au Sénat, dans le cadre du colloque « Quel avenir pour l’Arctique ? », seront les prémices de cette participation. 


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1. Du 31 octobre au 2 novembre 2014. (NDLR)

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