Nicolas Sarkozy et la démocratie

parInstitut Jean Lecanuet
16 Mars 2018
Actualité

Entre deux tempêtes de neige et trois avalanches, la presse française s’est fait l’écho des propos tenus par Nicolas Sarkozy à Abou Dhabi lors de l’une de ces conférences internationales très prisées des anciens chefs d’État.

On sait que ces derniers s’y disputent la place et les cachets tels les anciennes stars du football sur les plateaux télé le soir des matchs de ligue des Champions.

Cette fois, les organisateurs avaient choisi le leadership comme thème de leur forum. C’était tout à fait bien vu de leur part puisqu’au même moment le président chinois décidait de son immortalité politique, l’Allemagne et l’Italie se débattaient comme des diables pour savoir qui allait les gouverner et Vladimir Poutine se lançait dans une campagne électorale qui le portera, en cas de succès, à presque un quart de siècle de leadership sur la Russie. Les commentaires de l’ancien président français sur cette actualité étaient donc particulièrement attendus et il est un fait que les participants en ont eu pour leur argent. 

C’est, en effet, à un véritable questionnement de l’élection démocratique qu’a procédé Nicolas Sarkozy. Pour faire simple, dans un monde complexe où la vision et la durée sont essentielles, nos systèmes démocratiques contemporains, avec leurs mandats très courts et leurs compétitions électorales incessantes sont, selon lui, de plus en plus inadaptés. Sans parler des critiques permanentes et toujours de mauvaise foi que portent médias et opposants sur l’action des gouvernants… Donc, longue vie à Xi Jinping, Poutine, monarques du Golfe et autres dirigeants du monde qui ont un vrai leadership, une vraie vision, et n’ont pas fait de la démocratie leur tasse de thé quotidienne. Et bon courage à Trump, Merkel et Macron, courageux leaders démocratiques empêtrés dans ces règles si obsolètes du gouvernement du peuple par le peuple et ces contraintes tellement gênantes de la séparation des pouvoirs entre exécutif, législatif et judiciaire. 

Comme souvent – et c’est bien le problème –, Nicolas Sarkozy a dit tout haut ce que certains commencent à penser tout bas, et pas seulement lors des réunions du Front national. C’est, en effet, des politiques tout à fait respectables, des intellectuels, des professeurs des universités, qui s’interrogent, eux aussi et de plus en plus bruyamment, sur la pertinence des vieux systèmes démocratiques et leur capacité à porter réformes, projets et visions nécessaires aux États. Sans parler, bien sûr, des opérations militaires extérieures ou de la lutte contre le terrorisme. Ne faisons pas grief à Nicolas Sarkozy d’avoir porté ce sujet sur la place publique. C’est son droit le plus absolu. Comme c’est évidemment le nôtre de contester radicalement sa vision des choses et de lui poser simplement ces quelques questions. Dans quels pays sont nés les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) ? Qui déposent les brevets ? Qui sont les Nobels ? Où sont les créateurs, les artistes, les innovateurs ? Où sont les universités, les centres de recherche, les laboratoires ? En Europe, en Amérique, au Japon, là où règnent la liberté et la démocratie, là où on peut débattre, là où on peut contester, remettre en cause, s’opposer.

Et puisque Nicolas Sarkozy a aussi convoqué Churchill dans son allocution, rappelons lui cette célèbre phrase du Premier Ministre britannique sur la démocratie « pire des systèmes à l’exception de tous les autres ».

 

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