Leur maestro à tous

parInstitut Jean Lecanuet
25 Février 2018
Actualité

Sylvio Berlusconi est la preuve vivante qu’on ne meurt jamais en politique.

A 82 ans, malgré les scandales, les défaites et les condamnations, l’homme politique le plus connu d’Italie pourrait être de nouveau le grand vainqueur des élections législatives du 4 mars prochain. Sans doute pas comme futur président du Conseil italien à cause de la peine d’inéligibilité qu’il doit purger pour fraude fiscale, mais comme possible « faiseur de roi » et « tireur de ficelles en chef » d’une future coalition.

Parmi les hommes politiques, peu osent se réclamer de cet octogénaire « immortalisé » par la chirurgie esthétique et les teintures capillaires, mais beaucoup lui sont redevables.

Silvio Berlusconi a compris le rôle des médias dans la politique et l’influence que pouvaient y avoir les grands groupes de presse comme le sien. Malgré la concurrence du numérique, la télévision reste son royaume. Il sait qu’elle garde son importance pour bon nombre d’électeurs et continue donc de courir les plateaux, ceux des grandes émissions politiques aussi bien que ceux des talk-shows ou des émissions de divertissement people.

Avant les autres, il a aussi intégré l’importance croissante qu’allait prendre le sport dans nos sociétés contemporaines. Pour les Italiens, comme pour les autres passionnés de football, il reste le président du grand Milan AC, celui d’un temps où l’Italie dominait l’Europe du football, celui d’un temps où il y avait l’église le matin et le stade l’après-midi.

Avant le mouvement Cinq étoiles de Grillo, avant l’espagnol Podemos ou le Grec Syriza, avant En Marche, il y a eu Forza Italia, le mouvement politique de Berlusconi. Un nom qui sonne comme une Ferrari en tête dans la dernière ligne droite de Monza. Le « Cavaliere » a anticipé le déclin des partis politiques et des idéologies. Il a eu l’intuition géniale de ce mouvement regroupant les déçus des partis de gouvernement et les inquiets des extrémismes. Le premier, il fut taxé de populiste. Quel compliment et quelle aubaine pour celui qui, précisément, avait bâti son programme sur le rejet des élites, des technocrates et des experts ! 

Avant Donald Trump, il a aussi inventé le parler cru, les gaffes volontaires, les blagues graveleuses et les allusions machistes. Chaque fois, on l’a donné perdu, déconsidéré, ostracisé à jamais, y compris par ses fidèles ; chaque fois, il a su rebondir, y compris auprès des électeurs qui auraient dû être les plus choqués par ses saillies et ses outrances. 

Enfin, il est aussi (et surtout) le Léonard de Vinci, le Michel-Ange même, des promesses électorales non tenues. Jamais un politique n’aura autant promis – sur les réformes démocratiques, le pouvoir d’achat, les déficits publics – et si peu tenu. Et pourtant, voici domaine où la concurrence est rude.

Décidément, il est bien leur maestro.

 

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