Emmanuel Macron réussira-t-il à vaincre le signe indien ?

parInstitut Jean Lecanuet
11 Août 2021
Actualité

Si on devait auditer la gouvernance de la République française comme on le fait d’une grande société privée, la première chose qui sauterait aux yeux serait le turnover permanent à la tête de l’exécutif.

Depuis François Mitterrand et Jacques Chirac, aucun président n’est parvenu à accomplir deux mandats consécutifs ; et encore, ceux-ci doivent paradoxalement leur réélection à leur défaite aux législatives de 1986 et de 1998 et à la cohabitation qui s’ensuivit. En fait, si l’on observe sur le temps long la Ve République, la discontinuité au sommet de l’État est toujours la règle. Il est quasiment impossible d’enchaîner septennats ou quinquennats sans qu’une défaite, soit à une législative, soit à une présidentielle, soit à un référendum, vienne interrompre le cours des choses et modifier les politiques en cours. C’est le lot de toute démocratie, bien sûr, d’opérer ces alternances et ces changements, mais ces derniers sont, en France, permanents à la tête de l’état alors que le paysage local n’offre pas de telles ruptures. Lors des élections locales, c’est la continuité qui est la règle comme l’ont confirmé les scrutins régionaux et départementaux de la fin du mois de juin. Les présidents de région ont presque tous été réélus comme les maires l’ont été en 2020 et, même parfois, pour un troisième ou un quatrième mandat. On est loin de l’instabilité présidentielle.

Alors quelle est la source de ce problème ? D’abord, à la différence des ministres ou même des députés à qui on reproche fréquemment de ne pas être représentatifs, socialement, de la population, les élus locaux endurent beaucoup moins cette critique. Et, quand cela peut être le cas, ils la compensent par la proximité et par la disponibilité. Au-delà de cet « effet miroir » bien connu en science politique, c’est surtout la question contractuelle qui explique le sort opposé réservé aux élus. L’élu local tient ses promesses de campagne, c’est toute la différence. Peu importe la raison de cette réussite des uns ou de cet empêchement des autres, c’est un fait peu contestable et il explique que la démocratie s’exprime de manière très différente à l’échelle nationale et locale. Alors Emmanuel Macron parviendra-t-il, en 2022, à vaincre le signe indien en réussissant à emporter l’élection présidentielle, puis l’élection législative qui suivra. Au-delà des convictions de chacun, c’est une issue qui pourrait être salutaire à notre démocratie surtout dans un contexte politique international qui permet à des personnalités peu regardantes en termes de démocratie de se maintenir au pouvoir très longtemps et d’inscrire ainsi des réformes dans la durée. 

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