Les Etats-Unis de Donald Trump

France Forum, n° 74, octobre 2019 - Automne

Revue France Forum

Il y a, en ce moment, dans les primaires du camp démocrate, un je-ne-sais-quoi d’inhabituel.

Sans doute parce que le personnage central de ces primaires, ce n’est finalement ni Elizabeth Warren, ni Joe Biden, ni même Bernie Sanders, mais le républicain Donald Trump. Qu’on le veuille ou non, tout ramène, chaque fois, à ce président américain à la personnalité si inédite.

Le Parti démocrate pourrait faire l’impasse sur 2020, se dire que Trump, comme beaucoup de ses prédécesseurs, fera deux mandats et que la patience est de mise. Le problème, c’est que Donald Trump est si clivant que personne au Parti démocrate – et ailleurs dans le monde – n’a envie de le supporter quatre ans de plus et tous se demandent comment, grâce à l’impeachment ou au suffrage universel, éviter un second mandat.

Ah, si le monde entier votait, et pas seulement le garagiste de l’Arkansas, il est vrai que tout serait beaucoup plus simple : Trump n’aurait aucune chance d’être réélu. Il s’en moque bien. Pour lui, c’est « America First » ; l’Amérique d’abord. La détestation des autres pays à son égard, c’est un peu sa Légion d’honneur, la preuve, pour ses électeurs, qu’il tient ses promesses. Rien ne semble entamer ses certitudes et celles de ses supporteurs. Ni les défaillances ou trahisons de proches ni les attaques du camp démocrate. Et encore moins une presse qui lui est très majoritairement hostile.

Trump est-il vraiment imbattable ? Il est clair que sa base électorale reste solide. Contre vents et marées. Malgré les incontestables performances de l’économie américaine, elle ne s’est pas, non plus, élargie. Les Américains s’interrogent sur les effets de la guerre commerciale avec la Chine. Même s’ils voient le plein-emploi, ils voient aussi les inégalités croître entre les « vraiment très riches » et les autres. L’électorat blanc et populaire de Trump restera-t-il hermétique et insensible aux fameux « plans » de Elizabeth Warren ? Des mesures telles que l’université gratuite – surtout si l’impôt des fameux « très riches » finance cette promesse de la candidate démocrate – peuvent les séduire.

Enfin, n’oublions jamais que l’élection américaine n’est pas l’élection française. aux États-Unis, il est nécessaire de gagner une majorité d’États, sans forcément obtenir la majorité des voix. Tout devrait donc se jouer, comme lors des scrutins précédents, à une poignée d’États, notamment ceux que Hillary Clinton était convaincue d’emporter et qu’elle a perdus. Trump doit conserver le vote des grands électeurs de ces États et rien ne dit qu’il y parviendra facilement.

Même si les Français et les Européens ne voteront pas le premier mardi qui suivra le premier lundi du mois de novembre 2020, ils auront les yeux rivés sur les États-Unis pour savoir qui sera le 46e président américain. Parce que ces États-Unis repliés sur eux-mêmes, ces États-Unis foulant aux pieds les valeurs de l’universalisme, ces États-Unis dénonçant les accords de Paris sur le climat ne sont pas les États-Unis. Le rêve américain, qui a bercé tant de générations, ne peut pas avoir disparu ainsi. « The Times they are a changing », chantait Bob Dylan il y a cinquante ans à Woodstock. Alors oui, espérons que les temps changent en 2020 et que « God Bless America ».

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