Visuel CINEMA - PANORAMA

Des tourmentes religieuses à l'ivresse paysane

parHenri JOZEFOWICZ

Articles de la revue France Forum

Chronique du 7ème art.

Spotlight de Thomas McCarthy (2015) est un film on ne peut plus d’actualité. Il entend décrire l’enquête minutieuse de ces journalistes américains qui mirent en cause la hiérarchie catholique dans des affaires de pédophilie. C’est à partir d’un article du Boston Globe que l’Église américaine, en 2002, fut secouée par ces affaires, le cardinal Law, archevêque de Boston, étant soupçonné d’étouffer le scandale. Le film s’appuie sur le travail d’enquête des journalistes, qui passe par l’épluchage de journaux locaux ou d’annuaires diocésains. Pourtant, un certain ennui apparaît au fur et à mesure du film. Le spectateur a l’impression que les journalistes passent leur temps à jeter des dossiers sur la table… Or, il y avait beaucoup à dire sur la manière dont ces affaires cléricales ont couvé avant d’éclater au grand jour. Pire : leurs causes sont ignorées, alors qu’elles auraient pu être soulignées, même a minima (culture du secret ecclésiastique, crise d’identité sacerdotale dans l’Église catholique depuis les années 1960…). Spotlight a été, sans jeu de mots, encensé. Il semble que le film doit davantage sa renommée à la cause qu’il aborde. Il se termine par quelques informations dont l’une est erronée : le cardinal Law, cité comme exerçant toujours une fonction dans le diocèse de Rome, n’est plus archiprêtre de la basilique Sainte-Marie-Majeure depuis 2011…

Toujours, dans le domaine religieux, Les Innocentes, film franco-polonais de Anne Fontaine (2015), traitent d’un couvent polonais dont certaines religieuses ont été violées par des soldats de l’Armée rouge, en 1945. Un jeune médecin français, Mathilde Beaulieu – incarnée par la ravissante Lou de Laâge –, va être sollicité pour aider ces religieuses à accoucher. Le film évite les poncifs : l’univers du couvent a beau être strict, les religieuses font preuve d’humanité, sans renoncer à leur rupture avec le monde. Il ne s’inscrit pas dans un manichéisme qui opposerait l’étroitesse d’un couvent à la légèreté du personnel médical français. C’est une rencontre entre deux univers qui ne sont pas caricaturés : celui d’une vie religieuse, non dénué d’attention pour ceux qui souffrent, et celui d’un monde profane qui, à sa manière, entend aider son prochain.

Quant à Saint Amour de Benoît Delépine et de Gustave Kervern (2016), le film a peu à voir avec la religion sinon avec celle du vin. Cette comédie franco-belge narre les péripéties de deux agriculteurs – un père incarné par Gérard Depardieu et, dans le rôle du fils, Benoît Poelvoorde. Du salon de l’agriculture aux autoroutes de France, nos agriculteurs sont embarqués dans un drôle de trio avec un chauffeur de taxi qui leur fait sillonner les routes de France. Le vin, consommé assidûment, produit l’effet attendu… Le film est un peu décevant. on pensait trouver un hommage aux paysans de France, à leur bon sens et à leur capacité à demeurer dans un métier tourmenté : il en ressort les grivoiseries et les écarts de conduite de ce trio hétéroclite. Une touche d’ennui plus qu’une provocation stimulante. Certes, la souffrance du monde agricole délaissé n’est pas ignorée, mais elle s’efface devant l’ivresse des personnages. on appréciera, cependant, cette réflexion du père, honoré à la fin pour son travail : ne jamais se plaindre. 

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