Ce chef va quitter, du même coup, la direction du WDR Sinfonieorchester, l’orchestre de la radio de Cologne, poste qu’il n’aura occupé que deux saisons malgré une fréquentation assidue de l’orchestre allemand depuis 2017. Il succédera, à quelques décennies près, à son compatriote Sergiu Celibidache, chef charismatique et engagé, qui dirigea l’ONF de 1973 à 1975 avec le niveau extrême d’exigence musicale et intellectuelle qui fit sa réputation. Tous les deux roumains, Celibidache était de Laşi, près de la Moldavie, et Măcelaru de Timişoara, ville connue pour sa tradition multiculturelle, même sous le régime de nicolae Ceauşescu.

Tandis que « Celi » avait fait ses classes à Berlin principalement, notre jeune chef (39 ans tout de même) a accompli ses années de formation aux états-Unis. Mais les deux chefs ont en commun un début de carrière foudroyant et une attirance pour le grand répertoire actuel.

Celibidache, nommé, en 1945, à la tête de l’Orchestre philharmonique de Berlin à la place de Wilhelm Furtwängler soupçonné de sympathies nazies, avait pris soin d’offrir au public berlinois les musiques récentes dont il avait été privé pendant les années obscures, celles de Paul Hindemith et de Egon Wellesz, en particulier.

Măcelaru, de son côté, a fait son miel des oeuvres des jeunes compositeurs américains comme Andrew nelson. Remplaçant temporairement, en 2012, Pierre Boulez à la tête de l’orchestre de Chicago, il reçoit, la même année, le prestigieux Solti Emerging Conductor Award, avant de recevoir, deux ans plus tard, le Solti Conducting Award. Depuis, il a dirigé les plus grands orchestres américains et européens. Espérons que l’engagement de ce nouveau chef donnera aux jeunes compositeurs français l’occasion de trouver un public plus large.

C’est une nomination inattendue. A l’heure où cet article est écrit, la page Internet personnelle du jeune chef est actualisée, mais pas celle de l’ONF. normal : la prise de fonction ne sera effective qu’en septembre 2021. En attendant, Emmanuel Krivine reste en place.

Dans Le Figaro du 11 novembre 2019, Christian Merlin trouvait que ce « parfait inconnu » faisait l’effet d’une surprise, sans dire si elle était bonne ou mauvaise. Radio France semble en mesure d’apporter cette précision : invité au Festival d’automne de Paris en 2018 pour un programme audacieux, Cristian Măcelaru y a fait sensation auprès des musiciens de l’orchestre qui ont, dès lors, plébiscité son art et sa manière.

Puissent les dirigeants de toutes disciplines être à l’écoute, comme l’ont été les instances décisionnaires de cette vénérable institution qu’est l’ONF, des souhaits des premiers concernés : la voix de la sagesse et de l’efficacité.