Le négationnisme économique. Et comment s'en débarasser, de Pierre Cahuc et André Zylberberg
Articles de la revue France Forum
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Couper l’herbe sous le pied des démagogues haranguant contrevérités et simplifications économiques, tel est l’objectif de Pierre Cahuc et de André Zylberberg. Les difficultés économiques que nous connaissons seraient essentiellement dues à une désinformation scientifique qui empêcherait les acteurs de prendre des décisions éclairées. Tel est leur postulat.
Heureusement, nous disent les auteurs, l’économie serait devenue expérimentale. Des méthodes rigoureuses, validées et reconnues par la communauté des sciences économiques, permettraient de produire des résultats sûrs. « Ce n’est pas le sujet abordé qui permet de qualifier une discipline de scientifique ou pas », mais plutôt « la méthode employée ».
Pour autant, peut-on vraiment considérer que l’économiste puisse étudier le comportement des humains avec la même certitude que le biologiste étudie celui des cellules ? Cela est-il même souhaitable ? La volonté de ce livre d’imposer une rigueur dans les prises de décision économiques n’est pas condamnable. Celle d’invalider toute conclusion qui n’aurait été validée par une communauté scientifique clairement délimitée l’est quelque peu. Dès lors, seuls les docteurs en science politique pourraient voter ? Seuls les agrégés de littérature pourraient écrire des romans ? Seuls les théologiens pourraient être croyants ?
Le cheminement des deux intellectuels est intéressant. On navigue à travers l’histoire de l’économie moderne qui a, souvent, profité de la désinformation et de l’incertitude pour prospérer. Pourtant, le sentiment qui en ressort est que les auteurs font usage de la même méthode qu’ils décrient : une accumulation de vérités simplifiées, tirées de références qui ne suivent pas forcément la méthode qu’ils défendent, mais qui vont dans le sens de leur propos. Cet ouvrage est néanmoins à lire avec attention car on ne peut que louer son objectif : « Ne pas [se] laisser berner par les impostures et la démagogie. »