Mode d’emploi d’un État antilibéral : la Hongrie
Articles de la revue France Forum
Pas de démocratie sans séparation des pouvoirs et sans contre-pouvoirs.
Il y a quelques mois, d’importantes manifestations ont agité les rues de Budapest, faisant pression sur le gouvernement pour qu’il cesse sa campagne contre le philanthrope George Soros et l’université d’Europe centrale dont il est le fondateur. Des voix se sont également élevées contre les tentatives du même gouvernement de brider les ONG hongroises. Ces protestations n’ont pas empêché le parti au pouvoir, le Fidesz, de faire adopter via le Parlement des lois destinées à restreindre l’autonomie de l’université et réprimer les ONG qui doivent se présenter systématiquement et publiquement comme des organisations à financements étrangers dès lors qu’elles perçoivent des ressources étrangères supérieures à 25 000 euros. L’insécurité quant à leurs libertés fondamentales et à leur intégrité interroge sur l’état de la démocratie hongroise.
Il y a trente ans, le Fidesz se prétendait le parti de la jeunesse hongroise et déclarait dans son texte fondateur : « À lui seul, le pouvoir étatique n’est pas une garantie suffisante de la démocratie. L’unique garantie est la culture politique démocratique des citoyens. Le pluralisme politique est très important, mais il n’est pas satisfaisant. notre mission consiste à donner à la population les moyens de s’organiser librement en communautés capables d’élire leurs propres gouvernements. » Aujourd’hui, cette vision d’une société ouverte et autonome semble bien dépassée. Au contraire, les leaders du Fidesz croient en son contrôle.
Après quarante ans de communisme, la renaissance de la société civile hongroise a connu un développement spectaculaire. Des milliers d’ONG ont vu le jour, organisant la société en communautés diverses et autonomes. La possibilité offerte aux citoyens de consacrer 1 % de leur impôt personnel aux ONG de leur choix a constitué un véritable stimulant de la conscience démocratique. en parallèle, l’État hongrois a mis en place un fonds civil national destiné à soutenir la société civile dans de nombreux domaines alors que l’intégration dans l’Union européenne a engendré une augmentation des ressources financières des ONG. Ces mécanismes ont permis à cette vigoureuse société civile hongroise de bénéficier d’une intégration réussie, non seulement dans les processus décisionnels nationaux, mais aussi dans les réseaux européens.
Cette situation s’est dégradée à partir de 2010,...