Sur proposition du Premier ministre
Articles de la revue France Forum
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« J’ai le sentiment profond d’être plus utile à écrire des livres qu’à être ministre », répond Érik Orsenna alors qu’on lui propose d’entrer au gouvernement. Une exception ! Un indomptable ! Aimé Césaire en est un autre exemple, malgré l’insistance de François Mitterrand. Sans doute parce que tous deux n’étaient pas des politiques car, en France, le rêve de tout homme politique, son ambition, secrète ou avouée, est bien de devenir ministre.
Jean-Pierre Bedéï nous décrit l’attente interminable et insupportable dans laquelle sont plongés les impétrants au précieux maroquin. L’indifférence est la règle, mais la réalité est tout autre. On guette la vibration de son téléphone portable. On appelle ceux qui, peut-être, sauraient. On envoie ses collaborateurs aux nouvelles. Il y a ceux qui espèrent entrer au gouvernement, mais aussi ceux qui redoutent d’en être congédiés. La consécration d’un parcours politique ou l’infamie !
C’est à Matignon et encore plus à l’Élysée que tout se joue. L’auteur nous confie de savoureuses anecdotes sur des erreurs de noms ou sur des appelés de la toute dernière heure. Une carrière politique tient parfois à peu de chose. les témoignages sont nombreux. De survivants et de victimes. Certains faits sont connus, d’autres le sont moins, en particulier sur la période récente. avec le temps, les langues se délient. Pour certains, il est l’heure de se délivrer d’une douleur sourde, enfouie au fond de soi. « On s’aperçoit qu’on n’est plus ministre quand on s’installe à l’arrière d’une voiture et qu’elle ne démarre pas », plaisante François Goulard, ancien ministre de Jacques Chirac. tous n’ont pas ce détachement et ce sens de l’autodérision. Pour la majorité, la rancoeur, l’humiliation, l’injustice demeurent, même des années après, et on n’a pas encore imaginé de cellules d’assistance psychologique ou de groupes de parole pour ministres licenciés !
L’Archipel, 2015 – 18,95 €