Le conflit kurde dans les années 2020
Articles de la revue France Forum
Une nation unie dans la division.
Concernant le sort d’un peuple de plus de 30 millions d’âmes installé à cheval sur les frontières de quatre états, la « question kurde » a marqué le XXe siècle avant de prendre de nouvelles formes au cours des premières décennies du XXIe siècle. Qu’elle soit pacifique ou
armée, se présentant comme occidentaliste, « marxiste-léniniste », néo-libérale ou démocrate radicale, « féministe et écologique », la contestation kurde a toujours été portée par deux revendications : le droit à l’autodétermination, souvent limité à une autonomie élargie ou à un modèle fédéral, et la démilitarisation et la fluidification des frontières pour permettre au groupe d’exister comme une seule communauté nationale par-delà sa division forcée entre quatre entités étatiques. Solidement arrimés à un nationalisme exclusif, arabe, persan ou turc, Ankara, Bagdad, Damas et Téhéran ont toujours été tentés de résoudre cette « question » par des politiques répressives ; si elles n’ont pas manqué occasionnellement d’instrumentaliser la contestation kurde dans un pays voisin pour imposer leur hégémonie à l’échelle régionale, ces capitales ont su s’allier lorsqu’il le fallait pour empêcher la naissance d’une entité kurde indépendante.
L’écrasante majorité de la population kurde se trouve en Iran (plus de 10 millions de personnes) et en Turquie (plus de 15 millions), deux pays qui, des années 1920 à nos jours, ont été le théâtre de nombreuses révoltes et guérillas kurdes. Les régimes iranien et turc, qui se présentent comme islamiques mais sont avant tout profondément nationalistes, profitent de l’effondrement de l’Irak et de la Syrie, deux sociétés historiquement fragmentées et en proie à de multiples conflits internes, pour les mettre sous leur domination. Il n’est dès lors pas étonnant de...