En 2009, une jeune mère chrétienne du Penjab pakistanais, Asia Bibi, est accusée de blasphème envers le prophète Mahomet. Après être allée puiser de l’eau pour ses collègues musulmanes, elle aurait été qualifiée d’impure par ces dernières. Elle se serait alors défendue en arguant que le prophète de l’islam n’aurait pas approuvé de tels propos. Elle est jetée en prison et condamnée à la pendaison. Le gouverneur du Penjab, Salman Taseer, et le ministre des Minorités, le catholique Shahbaz Bhatti, volent alors à son secours en critiquant la loi sur le blasphème. Les deux hommes paieront le prix fort de ce soutien et seront assassinés, respectivement en janvier et mars 2011, par des islamistes. Asia Bibi sera finalement acquittée par la Cour suprême et autorisée, en 2019, à quitter le Pakistan pour le Canada, non sans avoir été au cœur d’une controverse qui prendra des dimensions internationales. Plusieurs mobilisations de groupes extrémistes appelleront aussi bien à son meurtre qu’à celui de ses juges.

L’INFLUENCE GRANDISSANTE DES ISLAMISTES. Comme cet exemple très médiatisé, mais non isolé, en témoigne, le Pakistan est sans conteste l’un des pays du monde les plus durement touchés par l’extrémisme religieux et l’intolérance à l’encontre des minorités religieuses. Musulman à plus de 96 %, ce pays de 207 millions d’habitants est né, au nom de l’islam, d’une partition avec l’Inde, en 1947. Il accueille toujours des hindous, des sikhs, des zoroastriens ou encore des chrétiens (principalement installés dans la province du Penjab, ils représentent environ 1,5 % de la population, à parts égales entre catholiques et protestants), sans compter les ahmadis, une minorité se réclamant musulmane mais n’étant pas constitutionnellement reconnue comme telle. Coutumier du sectarisme entre sunnites et chiites, mais aussi entre différents courants du sunnisme, le Pakistan apparaît comme un observatoire privilégié des violences et des discriminations perpétrées au nom de la religion – à la fois entre sectes musulmanes et contre les minorités, par l’Etat ou contre lui.

Ces dynamiques complexes n’ont fait que...