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Les relations entre l’Union européenne et la Turquie, entre partenariat et défiance

parNicolas MONCEAU, maître de conférences à l’université de Bordeaux, chercheur à l’Institut de recherche Montesquieu, chercheur associé à l’Institut français d’études anatoliennes-Georges Dumézil (Istanbul)

Articles de la revue France Forum

Entre Moscou et Bruxelles, Ankara devra choisir !

La rencontre des présidents russe Vladimir Poutine et turc Recep Tayyip Erdogan, à l’occasion du lancement à Istanbul, le 8 janvier 2020, du gazoduc Turkstream – symbole de la coopération énergétique entre la Russie et la Turquie –, constitue la huitième entrevue bilatérale en l’espace d’une année. En contraste, la dernière visite du président turc à Bruxelles afin de rencontrer les responsables européens remonte au mois d’octobre 2017. Ce déséquilibre met en évidence la place désormais marginale occupée par l’enjeu européen dans la politique étrangère turque. Longtemps définie comme son objectif prioritaire, l’adhésion à l’Union européenne (UE) apparaît désormais reléguée en arrière-plan, sinon ignorée, par la Turquie au profit de l’approfondissement de nouveaux partenariats dont la coopération multidimensionnelle avec la Russie se révèle emblématique. Malgré des efforts de relance dans le contexte récent de la crise migratoire, la stagnation des négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE, ouvertes depuis 2005 et au point mort depuis plusieurs années (avec seulement 16 chapitres ouverts sur 35 et un seul provisoirement clos), traduit l’état préoccupant des relations turco-européennes aujourd’hui.


UN RAPPROCHEMENT CONTRE TOUTE ATTENTE. La déclaration et le plan d’action adoptés par la Turquie et les États membres de l’UE, en novembre 2015, suivis de l’accord sur les réfugiés, en mars 2016 – favorisé par la chancelière allemande, Angela Merkel, pourtant connue pour son opposition à l’adhésion turque –, laissaient présager une relance potentielle de la coopération entre la Turquie et l’UE. En privilégiant deux enjeux majeurs – migratoire et sécuritaire –, ce rapprochement opéré contre toute attente traduisait surtout le dilemme des Européens contraints de coopérer avec la Turquie afin de gérer les flux migratoires qui se déversaient sur l’Europe et de renforcer la lutte contre le terrorisme international – en particulier des djihadistes provenant de Syrie – tout en dénonçant les dérives autoritaires du régime turc et les multiples atteintes aux droits de l’homme dans ce pays. L’accord de 2016 prévoyait, entre autres, une...

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