On ne goûte plus guère aujourd’hui le genre poétique. Seul peut-être l’épisode du bac français vient encore rappeler à quelques parents-répétiteurs la beauté inouïe d’un sonnet de Verlaine ou la tristesse infinie d’un quatrain de Lamartine.

Dans une société où plus rien ne peut être dissimulé, surtout dans le domaine de l’amour et des sentiments, quel peut bien être encore l’intérêt du poème ? Dans une société de l’immédiateté, à quoi bon se lamenter de la fuite du temps ou méditer sur la majesté des grands chênes ? Il reste, pourtant, quelques irréductibles. Des amoureux de la poésie. Ceux qui ne s’endorment jamais sans saisir l’anthologie toujours posée sur la table de chevet. Ceux qui restent capables de réciter du Villon ou du Francis Jammes. Ou même du Heine en allemand.

Charles Delamare fait partie de ces survivants. Jusqu’à s’essayer, lui aussi, à son genre préféré. Mais comme toujours avec humour, culture et passion de la politique. Trop familier de nos génies pour oser partir seul vers le grand large, Charles Delamare préfère caboter au plus près de ces maîtres. Il prend appui sur leurs chefs-d’œuvre pour proposer sa petite musique contemporaine. Pour nous donner envie de relire ces merveilles du genre humain et pour nous dire aussi et surtout leur modernité. Leur modernité et leur utilité. Les siècles passent, mais les problèmes restent les mêmes ; qui mieux que Ovide, Ronsard, Apollinaire ou Toulet pour nous aider à y faire face ?

Librairie-galerie Racine, 2014 – 15 €