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La démocratie contre elle-même

parFilipe TELES, professeur à l'université d'Aveiro (Portugal)

Articles de la revue France Forum

Les leaders politiques d'aujourd'hui sont avant tout de grands suiveurs.

Serions-nous sur le point de découvrir la solution à la carence de leadership politique que certains considèrent comme caractéristique des démocraties depuis une dizaine d’années ? Et si c’était le cas, est-ce bien la perspective désirée ? N’y a-t-il pas lieu, si la réponse à cette question se révèle positive, de nous en inquiéter ?

En son temps, le poète Sophocle avait réfléchi sur les passions individuelles des hommes d’État et de leurs opposants. Celui qui édicte les règles et celui qui les suit développent l’un envers l’autre loyauté et défiance et comme Créon, roi de Thèbes, le déclare dans Antigone pour sa défense : « L’esprit, l’âme et les desseins d’un homme ne peuvent être connus avant qu’il ait mené la chose publique et appliqué les lois. » L’obéissance et la confiance étaient les attributs principaux du leadership politique, la défiance était l’attribut du « suiveur » aussi bien dans les régimes autocratiques que démocratiques.

Nous assistons, aujourd’hui, à une refonte profonde de la nature intrinsèque du leadership politique, un changement au coeur même des hommes d’État : la défiance est maintenant l’outil des décideurs.

La nature du leadership politique a changé de manière significative au cours du temps et le triomphe de la démocratie, au siècle dernier, a contribué à une transformation sans précédent du leadership. L’avènement de la démocratie de masse...

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