Une prospérité sans croissance
Articles de la revue France Forum
Des économistes inconnus à l'adresse indiquée.
En 2008, la reine Élisabeth II, en visite à la London School of Economics, a demandé aux économistes présents pourquoi aucun d’eux n’avait su prévoir la crise financière. Surpris, les économistes ont souhaité un peu de temps pour considérer la question et y répondre. Quelques mois plus tard, ils signaient une lettre de trois pages à l’attention de la reine : « Pour résumer, votre Majesté, conclurent-ils solennellement, l’incapacité à prévoir la crise, son étendue et sa sévérité […] est principalement due à l’échec de l’imaginaire collectif de gens brillants […] qui n’ont pas appréhendé le risque qui pesait sur l’ensemble du système. »
C’était une lettre écrite avec humilité. Mais elle était aussi trompeuse. Évidemment, il y avait (et il y a) un échec collectif de la pensée économique. Mais cela ne répondait pas véritablement à la question. Comment une telle omission a pu se produire ? Pourquoi les économistes n’ont-ils pas pu comprendre le risque inhérent au système ? Et pourquoi devrions-nous abandonner à la « pensée collective » la tâche de nous protéger d’un désastre financier ? Pourrons-nous encore être créatifs après avoir tout sacrifié sur l’autel de la croissance économique ?
LA QUESTION DE LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE. Voici la vérité. Une économie dont la stabilité repose sur la stimulation permanente de la demande des consommateurs en vient forcément à étendre sa masse monétaire pour soutenir la croissance. Le bourgeonnement des crédits qui accompagne cette stimulation crée des bilans économiques et financiers fragiles. Des instruments financiers complexes...