Les débats qui se déroulent dans le cadre de la campagne pour les élections au Parlement européen de mai 2019 confirment que bien peu de candidats assument l’UE telle qu’elle fonctionne aujourd’hui. Tous veulent la changer, la refonder ou même la dé-potentialiser. En France et dans tous les Etats membres, cette même lancinante logorrhée contre les institutions européennes est scandée, avec des argumentations parfois diamétralement opposées. L’électeur peut légitimement se sentir désorienté devant l’absence de nouvelles perspectives clairement proposées.
Ce numéro de France Forum aborde plusieurs des questions existentielles de ce qui reste le meilleur instrument de paix que le continent européen ait réussi à construire dans son histoire bimillénaire. Une interrogation qui n’a jamais vraiment reçu de réponse est bien celle des frontières. Quel devrait être et quel sera le périmètre final de l’UE ? Le Brexit, en discussion depuis trois ans, illustre dramatiquement cette question tout en catalysant d’autres aspects tout aussi préoccupants quant à l’intégrité du projet européen. Le processus de négociation en vue d’une éventuelle adhésion des pays des Balkans de l’Ouest ou même de la Turquie est également de nature à s’interroger sur les limites et la forme que devrait prendre l’Union européenne dans une dizaine d’années. Enfin, la politique de voisinage de l’UE, en particulier le partenariat oriental qui fête ses dix années de mise en œuvre, doit également nous aider à nous interroger encore et toujours sur le type de relation, aussi constructive que possible, que l’union européenne doit entretenir avec la Russie, partenaire continental impossible à ignorer.
Ce numéro regroupe une série d’articles spécialement dédiés aux pays de l’Europe du Nord, souvent cités comme modèles démocratiques, où il ferait bon vivre en raison d’une cohésion sociale pacifiée et bien plus prononcée qu’ailleurs. Est-ce vraiment le cas ? En soulignant cette supposée qualité de vie nordique, il s’agit de souligner que le principal échec de l’union européenne (aujourd’hui), qui la minerait de l’intérieur, est finalement l’absence de réelle convergence économique et sociale entre ses vingt-huit membres, en dépit des milliards d’euros déployés depuis la création des fonds structurels et de cohésion. Nous aurions ainsi pêché par naïveté ou par excès d’optimisme. Faut-il, dès lors, renoncer au dépassement de la notion de frontières au sein de l’union européenne ? Faut-il renoncer à déplacer certains pans de l’exercice de la souveraineté nationale vers une organisation supranationale lorsque celle-ci se révèle plus efficace et reste une garantie de paix ? Certainement pas. Ce numéro de France Forum nous aide à le croire.
François Lafond
président de Blue Network and Opportunities